À épingler

❤️ Bulletin X Bien Urbains. Ce hors-série est réalisé en duo avec Delphine et Marine, les deux journalistes de Bien Urbains. Cette newsletter explore les initiatives pour rendre les villes plus conviviales, plus vertes, plus sereines (pour découvrir, c’est ici).

Égalité

Comment Vienne est devenue la capitale des femmes

iStock

La philosophie. Depuis plus de 20 ans, la capitale autrichienne a choisi de donner toute leur place à ses habitantes. Les projets d’urbanisme sont réfléchis pour simplifier les tâches quotidiennes encore majoritairement dévolues aux femmes — faire les courses, aller chercher les enfants…

Le principe. Concrètement, une ville égalitaire, ce sont des trottoirs élargis pour mieux accueillir les poussettes, des crèches publiques installées dans les résidences, un éclairage de nuit renforcé dans certains quartiers pour améliorer le sentiment de sécurité ou encore des pictogrammes d’hommes portant des enfants pour indiquer les places prioritaires dans le bus.

Le chiffre. Selon une étude à Vienne, deux tiers des trajets en voiture sont effectués par des hommes. Deux tiers des déplacements à pied le sont par des femmes.

Les limites. La croissance de la capitale autrichienne risque de mettre à mal cette politique ambitieuse. Vienne a besoin de 130 000 nouveaux logements d’ici 2025, et l’épuisement des ressources publiques pourrait nécessiter des compromis.

👉 À lire en anglais | en français

5 %

C’est la proportion de filles parmi les jeunes qui fréquentent les skateparks ou les city stades en France. Les adolescentes craignent d’y venir ou en sont souvent exclues. Plusieurs villes comme Malmö en Suède tentent de transformer leurs infrastructures pour leur faire davantage de place.

Les mots de la ville

❄️ Le déneigement féministe. Jämställd snöröjning en suédois, c’est le déneigement égalitaire. Le principe : s’occuper en priorité des trottoirs — utilisés le plus souvent par les femmes pour emmener les enfants à l’école — puis ensuite les routes. Cette règle est appliquée à Stockholm depuis 2015.

🏙 Le baiser d'immeubles. En Chine, quand deux buildings sont construits très proches l’un de l’autre au mépris des règles d’urbanisme, on parlera d’« immeubles qui se serrent la main » — 握手楼 wòshǒulóu — ou d’ « immeubles qui s’embrassent » — 接吻楼 jiēwěnlóu.

SPONSOR À propos

DR

Rouen, une Capitale européenne de la culture... vraiment européenne

🇪🇺 Un projet ambitieux. Le saviez-vous ? Rouen et la vallée de Seine normande sont candidates pour devenir Capitale européenne de la Culture en 2028. L’ambition ? Que chaque jeune du territoire de candidature, de Giverny au Havre en passant par Honfleur, soit en contact avec une action à dimension européenne. Soit près de chez elle ou chez lui, soit dans un autre pays européen.

🏘 Un réseau de villes-amies. Rouen Seine Normande 2028 — c’est le nom de la candidature — travaille déjà concrètement avec six villes européennes : Hanovre (Allemagne), Aveiro (Portugal), Kaunas (Lituanie), Norwich (Grande-Bretagne), Skopje (Macédoine du Nord), Trondheim (Norvège). Il faut y ajouter la République Tchèque où il y aura une deuxième Capitale européenne de la culture en 2028 et avec qui des liens étroits se nouent.

🌈 Une candidature inspirante. Le travail avec ces villes-amies répond à deux enjeux, d’une part alimenter le projet rouennais d’une dimension réellement européenne, d’autre part montrer en quoi le projet autour de la Seine normande peut s’avérer exemplaire, inspirant, instructif pour les autres régions européennes.

En un clic, soutenez la candidature de Rouen pour qu'elle devienne Capitale européenne de la culture en 2028.

Biodiversité

À Bruxelles, des citoyens au secours des moineaux

iStock

Un compagnon menacé. C’était l’un des seuls petits plaisirs du confinement : le chant des oiseaux en ville. Mais qu’on ne s’y trompe pas : en 15 ans, leurs effectifs ont chuté de 30 %. Le sort du moineau, espèce urbaine par excellence et très proche de l’homme, est emblématique. Sa population décline dans toutes les villes européennes. Il a même quasiment disparu à Londres. En cause : la nourriture humaine inadaptée, le bruit ou la difficulté à trouver dans les constructions nouvelles des cavités pour nicher.

Au secours des volatiles. Pour freiner cette hécatombe, des « groupes moineaux » ont vu le jour à Bruxelles sous l’impulsion d’ornithologues. Le principe : des brigades de citoyens comptent les volatiles, distribuent des kits moineau, avec mangeoire, nichoir et nourriture adaptés. Cette mobilisation commence à payer. Dix communes de la capitale belge ont désormais leur groupe et plus de 300 nichoirs ont été installés.

Pourquoi c’est important. Le moineau est une espèce « parapluie ». Protéger son habitat, c’est aussi protéger par la même occasion d’autres volatiles moins connus comme le troglodyte mignon ou le pouillot véloce.

👉 À lire ici

CHEZ NOS VOISINS

🏴󠁧󠁢󠁥󠁮󠁧󠁿 Angleterre. Depuis 2014, la ville de Batch fait rouler son « poo-bus » (le bus caca), grâce aux excréments de ses habitants.

🇵🇱 Pologne. Dans la ville de Poznan, ce sont huit palourdes équipées de capteurs qui contrôlent la qualité de l’eau potable de la ville. Si elles restent ouvertes, l’eau est bonne. Si en revanche, quatre d’entre elles referment leurs coquilles en même temps, c’est signe que l’eau est polluée.

🇪🇸 Espagne. Un zeste pour la planète ? Séville teste la production d’électricité grâce à la fermentation des 5,7 millions de kilos d’oranges qui poussent sur les 48 000 orangers de la ville. Soit assez de « jus » pour alimenter 73 000 foyers.

🇨🇭 Suisse. Si la construction en bois XL reste une niche comparée au béton, les grands projets se multiplient.

🇩🇪 Allemagne. À Karlsruhe à la frontière avec la France, il existe une école en forme de chat, dessinée par l’illustrateur français Tomi Ungerer.

pop culture

Et si on inventait de nouvelles statues pour Paris ?

Benoit Lapray

Photographe et spécialiste de la retouche d’images, Benoit Lapray s’est amusé à « statufier » les personnages de la culture populaire (jeu vidéo, dessin animé…) qui forgent notre imaginaire depuis des dizaines d’années. Il propose une balade photo dans les rues de Paris sous le regard des Tortues Ninja, de Son Goku, Gandalf, Batman et Wonder Woman.

👉 Voir ses photos

mobilité

Pontevedra, la ville (presque) sans voiture

Rda Suisse - Flickr CC

Le problème. Dans les grandes villes, un tiers des émissions de CO2 provient des transports. Si elle pollue, la voiture prend aussi de la place. À Paris, la moitié de l’espace public est réservée aux automobiles.

Une ville pionnière. Se balader sans gaz d’échappement qui picote les narines, laisser ses enfants faire de la trottinette dans les rues… Bienvenue à Pontevedra. En 20 ans, cette petite cité de 83 000 habitants en Galice a réussi à supprimer 90 % du trafic automobile. Et n’a plus comptabilisé aucun mort sur la route depuis neuf ans.

Le piéton roi. Pour en arriver là, il a fallu des années de travail et convaincre les habitants, notamment les commerçants, parfois réticents. La mairie a mis l’accent sur le confort des piétons. Des plans semblables à ceux du métro indiquent le temps de parcours d’un point à un autre, les trottoirs sont élargis et plus confortables. Les voitures, elles, ont la vie dure. Un automobiliste qui s’aventure dans le centre doit se justifier et tout stationnement dépassant 15 minutes est sanctionné d’une amende salée.

Et ailleurs ? Plusieurs autres agglomérations européennes tentent le même pari un peu fou. Oslo, en Norvège, 635 000 habitants, a piétonnisé 20 % de son centre à grand renfort de péages urbains pour financer les transports publics. En Slovénie, le centre de Ljubljana s’est vidé de ses voitures et a désormais le même niveau sonore qu’une forêt.

LES GRANDS Défis

🌊 Construire des villes-éponges. La montée des eaux et les inondations qui s’intensifient avec le réchauffement climatique menacent les villes. Une métropole comme Rotterdam est située à 80 % sous le niveau de la mer. Nos villes sont devenues tellement bétonnées que l’eau n’arrive plus à s’y écouler, créant des problèmes qui ne feront que croître à l’avenir ; saturation du réseau, pollution, impact sur la santé. L’une des solutions est de construire des villes-éponges, capables de se gorger d’eau comme une éponge lors des fortes précipitations. Comment ? Grâce à ses jardins, ses zones vertes et humides, ses lacs urbains, ses routes en béton poreux et ses toits végétalisés. Les squares peuvent même se transformer en bassin de rétention temporaire. Et quand cette eau s’évapore, c’est toute la ville qui est rafraîchie.

☀️ Rafraîchir les villes-fournaises. Le dérèglement climatique va aggraver le phénomène d’îlots de chaleur urbains. Entre végétalisations, matériaux de construction qui renvoient la chaleur et arrosage de l’asphalte… Lille, Lyon ou Paris ont engagé plusieurs grands chantiers pour rester vivables (vidéo 10').

futur

En ville, la guerre des trottoirs a commencé

iStock

Il faut observer les trottoirs. Sous cette bande d'asphalte se joue l'avenir de nos villes.

On rembobine :

  • Une histoire récente. On trouve les premiers trottoirs dans l’Antiquité. Au Moyen Âge, ils disparaissent pour laisser place à des rues en V censées drainer les saletés. La partie haute est réservée aux riches, d’où l’expression « tenir le haut du pavé ». C’est aux XVIIIe et XIXe siècles que nait le trottoir moderne, à Londres puis Paris. Le trottoir acte les deux grands principes de nos villes modernes : la séparation des flux entre piétons et véhicules et la marchandisation de l’espace public, comme le raconte le site pop-up urbain.
  • Un espace encombré. Depuis plusieurs années, la pression sur les trottoirs croît sans cesse. Le Covid a rebattu les cartes. Les plateformes numériques sont devenues de grosses consommatrices d'espace : Uber et ses voitures en double file, Deliveroo et ses livreurs à vélos, les loueurs de trottinettes ou de vélos. Lors du Black Friday, les livreurs engorgent la ville. La bordure de trottoir est devenu « le quai de débarquement » d'Amazon. Sans parler évidemment de l'impact d'un Google Maps sur le flux des piétons.
  • Une ressource stratégique. La gestion du trottoir va devenir stratégique pour les collectivités. Souvent vu comme un coût, il a en réalité une grande valeur. Aux États-Unis, Google l’a bien compris en faisant de sa gestion par les données un enjeu stratégique pour le futur, comme le détaille dans une interview passionnante la consultante Isabelle Baraud-Serfaty.

👉 À lire ici

LES gens de la ville

🧓🏻 Snajper baba. En serbe, la cheffe officieuse de l’immeuble. Postée à sa fenêtre, cette mamie « snipeuse » surveille si vous avez vidé vos poubelles ou garé correctement votre voiture. Elle n’hésitera pas à vous le faire savoir par un billet doux glissé dans votre boîte aux lettres. Son réseau d’informateurs est puissant, s’étendant du facteur à la vendeuse de la supérette, en passant par les autres mamies du quartier.

👴🏼 Umarell. À Bologne en Italie, le mot umarell — « petit homme » — désigne ces néo-retraités qui, par ennui, passent leurs journées entières à regarder les chantiers de construction en ville. On les reconnaît à leur posture caractéristique. Les mains jointes dans le dos, plantés comme des piquets devant les grillages, ils font profiter les ouvriers de leurs conseils, sans doute sages, mais très agaçants à la longue. En 2015, la ville de Rimini a décidé de transformer les umarell en indics. Leur mission : contrôler la bonne utilisation du sable et dénoncer les absents.

famille

Des villes à hauteur d'enfants

02Landskap

Des « enfants d’intérieur » ? En regardant de vieilles photos des années 1960, on pourrait se demander où sont passés les enfants en ville, leurs jeux de ballon dans les rues ou dans les terrains vagues. Pas une simple impression : depuis plusieurs décennies, le temps passé par les plus jeunes dans l’espace public recule. En cause : la place prise par la voiture, mais aussi la frilosité des parents.

Des rues sécurisées. Comment rendre alors la ville moins hostile et plus ludique pour les bambins ? Les « rues aux enfants » consistent à fermer des artères aux voitures pendant quelques heures afin de les dédier au jeu. Une fois la circulation coupée, habitants, parents, enfants sortent les boîtes de craie, un peu de peinture pour barbouiller le bitume, des jeux, des vélos, de la musique… Les premières rues de ce type datent de 1914 à New York. En France, à Lille par exemple, des centaines de rues aux enfants ont été organisées ces dernières années.

Des squares plus créatifs. Göteborg est l’une des villes les plus humides d’Europe. Plutôt que de s’en désoler, la ville a décidé de devenir la capitale de la pluie. En créant des Regnlekplatsen, des aires de jeux pour enfants particulièrement amusantes quand l’eau tombe. Les flaques et les abris de pluie en forme de nénuphars canalisent l’eau dans un bac à sable. Les enfants peuvent alors y créer rivières et barrages. Une école célébrant la pluie, avec des canalisations et des écluses, a même été construite. Quand il pleut, c’est la cour d’école qui se transforme en marais.

À picorer

🧒🏻 Des enfants heureux. Souvent, les jeunes couples quittent Paris pour que leurs mouflets puissent s'épanouir à la campagne. Mais est-ce si terrible de grandir en ville ?

🏘 Un urbanisme bancal. Si votre appartement au quatrième étage est cher, mal agencé et peu lumineux, c’est la faute du parking.

🚽 Une envie pressante. Ça vous est forcément arrivé. Une envie pressante alors que vous êtes en pleine rue, la tentation de vous soulager, là, sur ce muret ou entre ces deux voitures. Uriner en ville, miction impossible ?

💩 Un gros besoin. Quand Joseph Bazalgette, un Français originaire du Tarn, invente le tout-à-l’égout lors de la Grande Puanteur de Londres en 1858, c'est une révolution sanitaire.

🏛️ Un GPS antique. L’université Stanford vous propose un voyage de ville en ville au sein de l’Empire romain. Pour rallier Massilia (Marseille) à Condate (Rennes) en plein hiver avec votre légion, prévoyez un peu large — un bon mois — et du foin pour vos ânes.

👀 Des métiers oubliés. Le site Savoirs d’Histoire nous plonge dans Paris à la fin du XIXe siècle à la rencontre des métiers oubliés. Le cueilleur d’Orphelins ramasse les mégots des cigares pour récupérer le tabac, le hacher et le revendre à bas prix. Le marchand de feu se balade avec sa torche comme un briquet ambulant. Le réveilleur tire ses clients du lit chaque matin en hurlant sous leurs fenêtres ou en toquant avec un grand bâton. Le loueur d’enfants propose pour une somme modique de garder les enfants, tâche qu’il s’empresse de sous-traiter... à des mendiants.

art

Redonner les couleurs à nos villes

Ville de Saint-Dizier

Quelle est, selon vous, la couleur des villes  ? Grise ? Pour donner aux façades de leur quartier des tons plus joyeux, des citadins s’arment de pinceaux et de bonnes idées.

Quelques initiatives :

  • À Pointe-à-Pitre-en Guadeloupe, le quartier Vatable était délaissé, décrépi, occupé par les dealers et la prostitution. En 2014, une poignée d’habitants décident de peindre eux-mêmes des fresques murales sur les façades. Aujourd’hui, le quartier attire les touristes et des événements, de nouveaux propriétaires investissent les maisons, des activités culturelles sont organisées. Malgré le peu de moyens financiers à disposition, l’initiative essaime également dans d’autres communes de l'archipel.
  • À Brest surnommée « La Grise », un collectif d’habitants a aussi décidé de raviver les rues à coups de pinceaux. Au départ lancés sans autorisation, la municipalité de la cité bretonne encourage aujourd’hui ces joyeux ravalements.
  • À Montpellier et Saint-Dizier, les panneaux publicitaires sont utilisés comme des cimaises pour exposer des œuvres d’art. On attend le bus sous l’œil d’un Cézanne. Ces galeries à ciel ouvert permettent de mettre en lumière un sujet de fond : la pollution visuelle.
Plaisir des yeux

Le mosaïste qui pansait les rues

Ememe

Il doit son patronyme Ememem au bruit que fait sa mobylette quand il parcourt de nuit les rues de Lyon sa ville-atelier, son seau de ciment en main. Ce street-artiste pratique le flacking : l’art de combler les flaques et les cassures du béton avec des mosaïques colorées, qu’il signe parfois d’un « ci-gît un nid-de-poule ». Comme autant de petits pansements colorés sur la chaussée.

👉 Son Instagram

Partagez à vos amis

Je partage sur les réseaux sociaux

Whatsapp

bulletin.fr/mail/07062022/

Le mot de la fin

🚇 Sonder. Ce mot imaginaire – prononcer sondeur – est tiré du fabuleux « Dictionnaire des Douleurs Obscures ». Sonder, c'est ce sentiment vertigineux qui vous saisit quand vous réalisez que chaque personne que vous croisez furtivement quelques secondes dans la rue ou dans le métro vit elle aussi une vie aussi riche et complexe que la vôtre, avec ses rêves et ses espoirs. Et que ces milliers de vies forment une gigantesque fourmilière d’émotions humaines.

Les deux dessins du jour sont l'oeuvre de Perceval Barrier.

Une idée, une réaction, une critique ? hello@bulletin.fr


Gérer vos bulletins

Lire en ligne | Les archives

S'abonner | Supprimer Bulletin